Comment partager sa foi avec un ami musulman

Pendant des siècles, à cause de l’éloignement géographique, les musulmans furent, pour de nombreux chrétiens, des gens qui se trouvaient « là-bas » — de l’autre côté des océans, des mers et des continents. Aujourd’hui, c’est différent. Les quatre dernières décennies nous ont beaucoup rapprochés les uns des autres. Les musulmans — étudiants, immigrants, réfugiés, ouvriers — sont venus dans l’« Occident chrétien » ; et soudain, ce qui était essentiellement un travail d’évangélisation accompli à l’étranger, avec tout ce que cela comporte de sacrifices et de dépenses, est devenu une activité missionnaire de voisinage. De la même manière, le développement du tourisme et du commerce international a mis les chrétiens en contact étroit avec les musulmans dans leurs propres pays. Qui sont donc les disciples de l’islam ? Que croient-ils ? Comment pouvons-vous partager la bonne nouvelle de Jésus-Christ avec eux ?

Une religion mondiale

Pour faire une comparaison rapide, rappelons que sur une population mondiale de 5 480 millions de personnes, il y a 988 millions (18 pour cent) de musulmans et 1 833 millions (33 pour cent) de chrétiens.1 La majorité des adeptes de l’islam sont regroupés dans 31 nations. Parmi elles on compte des pays très peuplés comme l’Indonésie, le Bangladesh et le Pakistan. En fait, seuls 16 pour cent des musulmans parlent l’arabe comme première langue.

Les musulmans se trouvent à la fois dans les pays les plus pauvres et les nations les plus riches du monde. Parmi ceux qui prient cinq fois par jour en direction de La Mecque, se trouvent le pauvre paysan du Bangladesh qui ignore quand il prendra son prochain repas et le riche cheik du pétrole qui possède son avion privé avec lits d’hôpital et médecins personnels.

Origines. L’islam est apparu au 7ème siècle apr. J.-C. Les années 800 à 1200 en ont marqué l’âge d’or ; c’est une époque où les Arabes ont porté la flamme de la connaissance dans tout leur territoire, qui s’étendait de l’océan Atlantique à l’Indus. Durant cette période, les érudits islamiques excellaient en mathématiques, physique, chimie, astronomie, géographie et médecine. Plus tard, la désintégration politique des sociétés islamiques a entraîné la stagnation et la décadence dans les domaines culturels et scientifiques. Sur le front militaire, les musulmans ont aussi perdu leur puissance passée. Cela explique en partie sans doute pourquoi, vers 1920, tous les musulmans se trouvaient sous la domination ou l’influence occidentale. Mais depuis 1990, tous les pays islamiques sont indépendants.

Le fondateur. Mahomet (570-632 apr. J.-C.) fut le fondateur de l’islam. Orphelin à six ans, il voyageait constamment seul et faisait du commerce pour une riche veuve de 15 ans son aînée. Plus tard, après l’avoir épousée, il entra dans les affaires à La Mecque. Là, le temple (la Kaaba) contenait 365 idoles, objets de culte des différentes tribus bédouines. L’essentiel du commerce de La Mecque se faisait avec des voyageurs qui se rendaient à ce haut lieu de pèlerinage antique.

Mahomet passait beaucoup de temps dans la solitude et la méditation ; le polythéisme ambiant le révoltait. Selon la croyance musulmane, l’archange Gabriel lui apparut en 610 et lui révéla, pendant les 22 années qui suivirent, la parole de Dieu transcrite plus tard dans le Coran.

Les idées de Mahomet furent rejetées par les dirigeants mecquois et après une violente persécution, il dut s’enfuir vers la ville de Médine, en 622. Cette émigration (hijra) marque le point de départ de l’histoire de l’islam. A Médine, Mahomet fut bien accueilli et bientôt suivi par un important groupe d’adeptes. Ces musulmans retournèrent plus tard triomphalement à La Mecque et en firent le centre du culte islamique. La pierre noire de la Kaaba, ou temple, probablement un météore, fut désignée « don du ciel ».

La religion fondée par Mahomet s’appelle l’islam (soumission à Dieu). Elle regroupa les différentes tribus arabes en un peuple uni sur le plan social, culturel, linguistique et religieux.

Dieu. L’islam repose sur la croyance en un Dieu unique et tout- puissant, Allah, auquel les hommes doivent se soumettre. Allah est si différent de l’humanité qu’il est impossible de le représenter. Les caractéristiques mêmes qu’on lui prête n’ont rien de comparable avec les attributs humains. Allah se suffit à lui-même. Les actions de ses créatures ne peuvent pas l’affecter, il est à la fois la source du bien et du mal. Sa volonté est suprême, et n’est limitée ni par des lois ni par des principes. Cette croyance explique le fatalisme qui caractérise la façon de vivre des musulmans.

Bien qu’il y ait des similitudes nettes entre le Dieu chrétien révélé en Jésus-Christ et le Dieu musulman, Allah, on note aussi des différences essentielles. Dans l’optique musulmane, la puissance d’Allah se révèle par l’exaltation et la suprématie politique et militaire. Après tout, Mahomet le prophète fut aussi un chef militaire et un homme d’Etat. Par contre, pour les chrétiens, Dieu révèle parfois sa puissance dans la faiblesse, l’humilité et la souffrance. La croix est le point culminant de l’amour de Dieu, révélé dans l’humanité de Jésus-Christ.

Allah a aussi eu de nombreux prophètes ; on en compte environ 124 000 ; à travers les âges, ils ont proclamé sa volonté et ses avertissements à l’humanité. Les plus remarquables sont aussi des personnages bibliques ; parmi eux, on trouve Adam, Noé, Abraham, Moïse et Jésus. Mahomet, pourtant, est le dernier et le plus grand de tous. Ses révélations surpassent tout ce qui avait été exprimé auparavant.

Le péché. Les différences entre l’islam et le christianisme, à ce niveau, constituent peut-être l’un des obstacles majeurs à l’évangélisation des musulmans. C’est de là que vient l’acceptation ou le rejet de Jésus-Christ, prophète et Sauveur. L’islam reconnaît trois catégories de péchés. Certains sont de simples faiblesses dues aux limitations humaines ou à la négligence. Ils entraînent des sanctions plutôt qu’un châtiment. D’autres sont plus sérieux et doivent être punis. Parmi eux se trouvent la désobéissance aux parents, le meurtre d’un musulman, l’adultère et la calomnie d’un musulman vertueux. Le péché impardonnable est le « shirk » (le fait de se dérober à), qui consiste à avoir d’autres dieux devant Allah.2

Les croyances. La foi islamique repose sur cinq piliers, les articles de la conviction. Le premier est la profession de foi (chahâda) : « Il n’est de divinité que Dieu ; Mahomet est l’envoyé de Dieu. » Le deuxième est la prière rituelle dite cinq fois par jour à des heures spéciales (la prière du vendredi midi est la plus importante). Puis il y a le jeûne du ramadan (le neuvième mois du calendrier islamique) ; les aumônes qui varient selon le revenu et les possessions de chacun ; et finalement un pèlerinage à La Mecque.

Chaque musulman doit observer scrupuleusement les cinq piliers. Mais, dans les cas difficiles, il est possible de faire quelques exceptions.

A côté des cinq piliers, l’islam comporte cinq (certains disent six) articles de foi : croyance à l’unicité absolue de Dieu, aux anges, aux Livres révélés, aux prophètes, au Jugement dernier. Certains ajoutent le djihâd, l’effort suprême, couramment rendu par « guerre sainte », la défense de l’islam et l’attaque des autres croyances. Les musulmans les plus modérés voient dans le concept du djihâd la lutte contre le sous-développement et l’injustice.

L’islam se caractérise aussi par la polygamie (jusqu’à cinq femmes) et l’interdiction de consommer de l’alcool et du porc. Dans l’islam, il n’y a ni prêtres, ni sacrifice ; on ne trouve pas non plus de saints ni de reliques pour la protection personnelle, la fertilité, etc. Pourtant, parmi le peuple, la majorité des musulmans, influencés par les religions voisines (hindouisme, religions traditionnelles, etc.), pratiquent un islam populaire qui inclut la superstition, la magie et la vénération des saints.4

Le livre. Comme la chrétienté, l’islam a aussi un livre sacré. Le Coran est considéré comme la parfaite révélation de Dieu. C’est une reproduction des tables gravées à l’origine dans les cieux en langue arabe, considérée par certains comme la langue de Dieu. Le texte du Coran est saint et parfait, car la volonté d’Allah fut communiquée de manière miraculeuse à Mahomet. Bien que le Coran ait été traduit en 124 langues, seul le Coran arabe est reconnu. Toutes les traductions, même les plus exactes, sont considérées comme des interprétations du Coran. Ni Mahomet ni aucun autre être humain n’a eu une part quelconque à l’élaboration du Coran. Il est la source de tout conseil, de toute vérité et de toute science. C’est pourquoi aucun musulman n’a le droit d’en faire la critique.

Il y a là un piège dans lequel les chrétiens tombent souvent : la « bataille des livres ». Il est très facile d’engager une conversation avec un musulman et de comparer le Coran et la Bible. Pourtant, ce n’est guère possible. Pour le chrétien, la Bible, tout en étant considérée comme la voie divine qui mène à Dieu, n’est pas parfaite. Le Saint-Esprit a utilisé comme intermédiaires des êtres humains. Ceux-ci ont conservé leur style et leur personnalité propres. La révélation suprême de Dieu ne se trouve pas dans un livre mais dans la personne de Jésus-Christ. La différence peut se résumer ainsi : dans l’islam, la Parole de Dieu est devenue livre ; dans le christianisme, la Parole de Dieu est devenue chair.

Comme le Coran est un petit livre, il ne peut pas couvrir tous les aspects de la vie. Il a donc été élargi par la Sunna, paroles et actes de Mahomet, dont la vie irréprochable est un parfait exemple à suivre. Le texte écrit de la vie et des dires extra-coraniques de Mahomet fut recueilli 250 ans après sa mort dans les Hadîths. Avec le Coran, les Hadîths constituent la base de la Charî’a, loi religieuse qui régit tous les aspect de la vie islamique (spirituel, social, politique et économique). Seuls quelques pays ont été capables d’appliquer la Chari’a et ses rigoureuses sanctions à l’encontre des transgresseurs.5

Résistance au christianisme

La résistance islamique au christianisme, la méfiance et l’animosité réciproques qui existent entre les fidèles des deux religions les plus répandues, ont au moins quatre causes. D’abord, il existe des différences doctrinales fondamentales. Les principales concernent la personne de Jésus-Christ, l’authenticité des écritures de chaque religion, la qualité de prophète de Mahomet et la doctrine du salut. Ensuite, il y a aussi les confrontations politiques et historiques qui ont opposé les deux puissances en quête de suprématie dans les pays méditerranéens. Troisièmement, nous devons ajouter que les deux religions ont un but missionnaire, elles ont l’ambition de s’étendre et visent parfois les mêmes populations.

Finalement, l’évangélisation des musulmans a été longtemps difficile parce que les chrétiens se sont trop souvent arrêtés à la théologie islamique et aux points de désaccord. Nous ne nous sommes pas vraiment intéressés aux croyances de l’islam populaire et aux besoins du musulman moyen ; 80 à 90 pour cent ont des conceptions plus ou moins syncrétiques et associent des croyances et pratiques non islamiques aux doctrines et aux coutumes musulmanes.

Ainsi, que devrions-nous faire quand nous avons un voisin ou un camarade de classe issu d’un milieu musulman ? D’abord, il faut savoir qu’il y a autant de diversité chez les musulmans que chez les chrétiens. Cela va des fondamentalistes orthodoxes qui prennent le Coran à la lettre, suivent les traditions de très près et souhaitent un retour aux conditions de vie des premiers temps de la foi, aux libéraux qui ne retiennent pour la forme que quelques notions musulmanes symboliques. Certains étudiants profitent du fait qu’ils sont « dans un pays éloigné », loin des pressions familiales et de la mosquée, pour se détacher des traditions islamiques. A côté de ces attitudes extrêmes, on trouve aussi le mystique à la recherche d’une sorte d’union avec Dieu, et le syncrétiste prêt à amalgamer croyances, pratiques islamiques et coutumes religieuses locales.6

Malgré ces différentes positions, les étudiants musulmans qui se trouvent à l’étranger ont tous deux choses en commun. Ils ne sont plus soumis aux pressions directes de la communauté et ils traversent une période de transition qui les rend ouverts et parfois même réceptifs.

Partager sa foi

Voici quelques conseils généraux qui vous aideront à partager votre foi avec un ami, un camarade de classe ou un collègue musulman :

  • Ayez des relations vraies et ne voyez pas seulement en votre ami la perspective d’une conversion. Il est important d’établir un climat de confiance et de compréhension mutuelles avant de tenter tout témoignage. Une relation d’amitié devrait être un but en soi et non pas un moyen d’évangélisation.
  • Ecoutez et apprenez. Contrairement à beaucoup de chrétiens, lesmusulmans parlent facilement de leur religion. N’abordez les différences essentielles mentionnées plus haut que lorsqu’un climat de confiance existera entre vous deux.
  • Le dialogue et le témoignage personnels ont souvent plus d’impact que les réunions publiques ou les discussions de groupes. Quand l’occasion se présente, parlez avec joie et enthousiasme de ce que Jésus-Christ a fait pour vous. Cela peut être beaucoup plus .convaincant qu’une argumentation solide reposant sur une bonne compréhension de la théologie et des pratiques musulmanes. Montrez l’importance de la prière dans votre vie personnelle ; dites ce que vous pensez de la mort et du jugement. Au cours de ces moments d’échanges, votre ami musulman parlera aussi de sa foi. De telles discussions se montreront enrichissantes et ouvriront peut être la voie au témoignage personnel.
  • Pensez aussi à inviter votre ami à l’église ou à des activités chrétiennes. Mais prenez soin, auparavant, de vous renseigner sur ce qui se passera à l’église ce jour-là. Certains sujets traités dans un sermon risquent de gêner des musulmans. Une réunion suivie d’un pot-Iuck est souvent la bienvenue. Dans de nombreux milieux islamiques, manger un repas ensemble scelle l’amitié.
  • L’utilisation des publications chrétiennes est aussi une très bonne forme de contact. La Bible constitue un excellent moyen. Elle est trois fois plus grosse que le Coran, et son style est différent. Un musulman ne devrait pas être encouragé à la lire d’une traite. Au début, certains livres et chapitres sont plus faciles à accepter que d’autres. Commencez avec la Genèse et les Proverbes ; ils sont en général bien compris par les musulmans. Luc constitue un bon début pour le Nouveau Testament. D’autres livres chrétiens peuvent aussi être utilisés. Nous devons nous souvenir que trop souvent, dans nos efforts pour évangéliser les musulmans, nous avons recours à toutes sortes de moyens différents,7 alors que l’Evangile lui-même « est la puissance de Dieu pour le salut ».

Conclusion

Le manque de place ne me permet pas de m’étendre. Et peut-être n’est- ce pas vraiment nécessaire. Avec les musulmans, comme avec n’importe quelle autre personne, ce qui compte le plus, en fait, c’est l’amour, les marques d’intérêt, l’honnêteté et la spontanéité. Les voies de Dieu sont mystérieuses.

Pour finir, juste une mise en garde. Rappelez-vous que pour les musulmans, l’islam n’est pas seulement une religion faite de croyances et de rites. C’est une manière de vivre qui englobe à la fois les pratiques religieuses, les affaires, la politique, la loi, l’éducation, les relations humaines et la famille. L’individualisme extrême que nous connaissons en Occident est contraire à l’islam et peu apprécié par les musulmans.

Cela devrait nous porter à la compréhension et à la patience. N’oublions pas que même si un jeune musulman est convaincu par nos arguments, il lui est parfois très difficile de changer de religion et de sortir du cercle familial.

Que Dieu nous aide dans cette tâche noble et délicate.

Borge Schantz (Ph.D., Fuller Theological Seminary) a été professeur et missionnaire dans plusieurs pays. Il est actuellement directeur du Seventh-day Adventist Global Centre for Islamic Studies en Angleterre.

Les lecteurs qui désirent recevoir le bulletin du centre et des renseignements dans ce domaine sont invités à écrire à Dr Schantz ; Newbold College ; Bracknell, Berks. ; RG12 5AN Angleterre.

Citation recommandée

SCHANTZ Borge, « Comment partager sa foi avec un ami musulman », Dialogue 4 (1992/2), p. 24-26

NOTES ET RÉFÉRENCES

  1. David B. Barrett, « Annual Statistical Table on Global Mission 1992 », International Bulletin of Missionary Research, 16 : 1 (janvier 1992), p. 27.
  2. Cyril Glasse, The Concise Encyclopedia of Islam (San Francisco: Harper and Row, 1989), p. 32 ; James Jomier, How to Understand Islam (London : SCM Press, 1989), p. 46, 47. 3. Jomier, p. 121
  3. Bill A. Musk, « Popular Islam : The Hunger of the Heart », dans The Gospel and Islam, Don M. McCurry, éd. (Monrovia, Calif. : MARC, 1979), p. 208 s.
  4. Glasse, p. 362.
  5. Don McCurry, Muslim Awareness Seminar (Pasadena, Catif. : Samuel Zwemer Institute, 1981). p. 63
  6. Martin Goldsmith, Islam and Christian Witness (MARC Europe, 1982), p. 109 s.

LECTURES RECOMMANDEESAnderson, Norman, Islam in the Modern World, Leicester, England : Apollos, 1990.

Cragg, Kenneth, The Call of the Minaret, New York : Orbis Books, 1985.

Guillaume, Alfred, Islam, New York : Penguin Books, 1954.

Oster, Kenneth, Islam Reconsidered, New York : Exposition Press, 1979.

Parshall, Phil, The Cross and the Crescent, Amersham, UK : Scripture Press, 1989.

Wieland, Robert J., In Search of the Treasure of Faith, Cape Town, South Africa : Southern Publishing Association, pas de date.

Woodberry, J. Dudley, rédacteur, MusIims and Christians on the Emmaus Road, Monrovia, California : MARC, 1989.

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