Histoire de la rédemption: « Le procès de Jésus »

Par Ellen G. White

LORSQU’ILS quittèrent le ciel, les anges ôtèrent tristement leurs couronnes. Ils ne pouvaient  pas  les  garder  alors  que  leur Chef, accablé de souffrances, devait porter une couronne d’épines. De leur côté, Satan et ses anges s’activaient dans la salle d’audience du tribunal afin  d’y  détruire  tout  sentiment de sympathie humaine. L’atmosphère elle-même était lourde, souillée par leur influence. Poussés par eux, les chefs des  prêtres et les anciens du peuple insultaient et  maltraitaient  Jésus d’une manière extrêmement difficile à supporter pour la nature humaine. Satan espérait qu’un tel mépris et une telle cruauté amèneraient le Fils de Dieu à proférer quelque plainte ou quelque murmure, ou qu’il manifesterait sa puissance divine, qu’il s’arracherait à l’étreinte de la foule, et qu’ainsi, le plan de la rédemption serait voué à l’échec.

Le reniement de Pierre

Pierre suivit son Maître après qu’il eut été trahi. Il se demandait ce qui allait advenir de Jésus. Mais lorsqu’on l’accusa d’être l’un de ses disciples, le souci de sa propre sécurité le poussa à dire qu’il ne connaissait pas cet homme Matthieu 26 :72. Les disciples étaient réputés pour la noblesse de leur langage. Aussi, pour convaincre ses accusateurs qu’il n’était pas disciple du Christ, Simon rejeta pour la troisième fois l’accusation qui était portée contre lui en jurant et en proférant des imprécations. Le Seigneur, qui se trouvait non loin de Pierre, lui jeta un regard de reproche mêlé de tristesse. Alors il se rappela les paroles que son Maître lui avait adressées dans la  chambre haute et sa présomtueuse affirmation : “Même si tous les autres t’abandonnaient, moi je ne  t’abandonnerai  jamais”  Matthieu 26 :33. Ainsi, il avait renié son Seigneur en formulant des jurons et des imprécations. Heureusement, ce regard de Jésus vainquit le cœur de Pierre et le sauva. Il pleura amèrement, se repentit de la faute grave qu’il avait commise et se convertit. Alors il fut en mesure de fortifier ses frères.

Dans la salle d’audience du tribunal

La foule réclamait à grands cris le sang de Jésus. Il fut cruellement flagellé, on le revêtit d’un vieux manteau de pourpre, et on fixa sur sa tête sainte une couronne d’épines. On lui mit aussi un roseau dans la main et on s’inclina devant lui en disant, sur un ton de moquerie : “Salut, roi des Juifs !” Jean 19 :3. Puis on lui prenait le roseau et on l’en frappait sur la tête, enfonçant ainsi les épines dans ses tempes, ce qui faisait ruisseler le sang sur son visage et sur sa barbe.

Pour les anges, pareil spectacle était difficilement supportable. Ils auraient voulu délivrer le Seigneur, mais ceux qui les commandaient les en empêchaient et déclaraient que telle était la lourde rançon qui devait être payée pour les humains, que celle-ci devait être parfaite et qu’elle coûterait la vie de Celui qui avait le pouvoir de la mort. Jésus savait que les anges étaient témoins de cette scène d’humiliation. Assurément, le plus faible d’entre eux aurait pu terrasser cette foule railleuse et délivrer le Christ. Le Sauveur avait la certitude que s’il le demandait à son Père, des anges le libéreraient immédiatement. Mais il fallait qu’il subisse la violence des hommes méchants pour réaliser le plan du salut. Pendant que la foule en furie lui faisait subir les plus viles injures, Jésus se tenait doux et humble devant elle. On lui crachait au visage—ce visage dont les impies essaieront un jour de se cacher, qui éclairera la cité de Dieu et brillera d’un éclat plus éblouissant que celui du soleil. Cependant, le  Christ  ne  jeta pas sur ses offenseurs un regard de colère. Ils lui couvrirent la tête d’un vieux vêtement pour l’empêcher de voir, le frappèrent au visage et lui  crièrent  :  “Qui  t’a  frappé ?  Devine !”  Luc  22 :64. Les anges étaient bouleversés. Ils auraient voulu délivrer Jésus sur-le-champ ; mais ceux qui étaient à leur tête les en empêchèrent.

Plusieurs disciples avaient obtenu l’autorisation de pénétrer là où se trouvait leur Maître et d’assister à son jugement. Ils espéraient que Jésus manifesterait sa puissance divine, qu’il échapperait à ses ennemis et les punirait de leur cruauté à son égard. Les espoirs des disciples renaissaient et s’évanouissaient à mesure que se déroulaient les différentes phases du procès. Ils se laissaient parfois gagner par le doute et craignaient d’avoir été trompés. Mais la voix qu’ils avaient entendue sur la montagne de la transfiguration et la gloire qu’ils y avaient contemplé renforçaient leur foi que Jésus était bien le Fils de Dieu. Ils       se remémoraient les scènes dont ils avaient été témoins, les miracles que le Seigneur avait accomplis pour guérir les malades, pour ouvrir les yeux des aveugles, les oreilles des sourds, pour reprendre et chasser les démons, pour ressusciter les morts et même pour calmer le vent et la mer.

Ils ne pouvaient se faire à l’idée que leur Maître mourrait. Ils espéraient toujours qu’il se dresserait, qu’il déploierait sa puissance et qu’avec autorité, il disperserait cette foule assoiffée de sang—comme lorsqu’il était entré dans le temple dont il avait chassé ceux qui avaient fait de la maison du Seigneur un lieu de trafic et qui s’étaient enfuis devant lui comme s’ils avaient été poursuivis par un régiment d’hommes armés. Oui, les disciples auraient souhaité que Jésus montre son pouvoir de manière que tous soient convaincus qu’il était le Roi d’Israël.

Une confession tardive

Judas était bourrelé de remords et de honte à la pensée d’avoir trahi Jésus. Et quand il fut témoin des mauvais traitements qui furent imposés au Sauveur, il fut littéralement accablé. Il avait aimé Jésus, mais davantage encore l’argent. Il n’avait pas cru que le Seigneur se laisserait emmener par la troupe d’hommes qu’il avait conduite au jardin. Judas s’était attendu à voir le Christ faire un miracle pour s’échapper de leurs mains. Mais quand le traître vit la foule en délire et assoiffée de sang massée dans la salle d’audience du tribunal, il se sentit profondément coupable ; et tandis que de nombreuses personnes accusaient Jésus avec véhémence, Judas se fraya un chemin parmi l’assistance et vint confesser qu’il avait péché en livrant le sang d’un innocent. Il proposa même aux prêtres de restituer l’argent qu’ils lui avaient versé en échange, les supplia de relâcher le Seigneur, en affirmant qu’il était totalement innocent.

Pendant quelques instants, le mécontentement et la confusion imposèrent le silence aux prêtres. Ces derniers ne voulaient pas que le peuple apprenne qu’ils avaient soudoyé un des disciples de Jésus pour le leur livrer. Ils ne voulaient pas que l’on sache qu’ils l’avaient pourchassé comme un voleur et avaient mis secrètement la main sur lui. Mais la confession que Judas venait de faire, son air désemparé, coupable, montraient suffisamment à l’assistance que c’était par méchanceté que les prêtres avaient fait arrêter Jésus. Tandis que Judas déclarait haut et fort que son Maître était innocent, les prêtres lui répliquèrent : “Que nous importe ? C’est ton affaire !” Matthieu 27 :4. Le Sauveur était entre leurs mains, et ils étaient bien décidés à ne pas le lâcher. Tourmenté au plus haut point, Judas jeta l’argent qu’il méprisait maintenant aux pieds de ceux qui l’avaient soudoyé et, saisi de frayeur et d’angoisse, il sortit et alla se pendre.

Jésus comptait de nombreux sympathisants parmi les gens qui l’entouraient, et en ne répondant pas aux multiples questions qui lui étaient posées, il avait beaucoup impressionné la foule. Malgré les quolibets et les  attaques  dont il  était  l’objet, pas  un signe de mécontentement, pas le moindre trouble n’étaient apparus sur son visage. Le Sauveur restait digne et calme. Les spectateurs le considéraient avec étonnement. Ils comparaient son attitude empreinte de dignité avec le comportement des hommes qui étaient là pour le juger, et ils se disaient les uns aux autres que ce Jésus ressemblait davantage à un roi que n’importe lequel de leurs chefs. Il n’avait rien d’un criminel. Son regard était à la fois doux, limpide et résolu. Son front était haut et large ; chacun de ses traits reflétait la bonté et la grandeur d’âme. Beaucoup tremblaient devant sa patience et sa magnanimité sans pareilles. Hérode et Pilate eux-mêmes furent profondément impressionnés par son attitude noble, proprement divine.

Jésus devant Pilate

Dès l’abord, Pilate eut la conviction que Jésus était une personne hors du commun. Il le considérait comme un homme de haute qualité et parfaitement innocent des accusations qui étaient portées contre lui. Les anges qui assistaient à la scène remarquèrent les convictions du gouverneur romain. Pour essayer de l’empêcher de prendre la responsabilité redoutable de livrer le Seigneur pour qu’il soit crucifié, un ange intervint au moyen d’un songe auprès de la femme de Pilate afin de l’informer que l’homme traduit devant son mari pour être jugé était le Fils de Dieu et qu’il était innocent. Elle fit immédiatement parvenir un message à Pilate dans lequel elle lui disait avoir beaucoup souffert en songe à propos de Jésus et l’avertissait     de ne rien avoir à faire avec ce saint homme. Le porteur de ce message, se frayant rapidement un chemin parmi la foule, le remit en main propre au gouverneur. En lisant son contenu, Pilate se mit à trembler, devint tout pâle et décida sur-le-champ de ne pas engager sa responsabilité dans la condamnation du Christ. Si les Juifs voulaient à tout prix la mort de Jésus, il ne leur prêterait pas son appui, mais il s’efforcerait au contraire de le faire libérer.

Le Seigneur devant Hérode

Quand Pilate apprit qu’Hérode se trouvait à Jérusalem, il fut grandement soulagé, car il espérait ainsi se dégager de toute responsabilité dans le jugement et la condamnation de Jésus. Aussi envoya-t-il immédiatement le Christ et ses accusateurs à Hérode. Ce dignitaire était un pécheur endurci. L’exécution de Jean-Baptiste avait laissé dans sa conscience une tache indélébile. Lorsqu’il entendit parler de Jésus et des grands miracles qu’il accomplissait, Hérode fut saisi de crainte et se mit à trembler, croyant qu’il s’agissait de Jean-Baptiste ressuscité des morts. Le fait que Pilate déféra l’accusé devant Hérode fut considéré par ce dernier comme un hommage rendu à son pouvoir, à son autorité et à sa capacité juridique. Il en résulta que ces deux dignitaires autrefois ennemis devinrent amis. Quoi qu’il en soit, Hérode se réjouit   de voir Jésus, car il espérait que le Seigneur accomplirait un grand miracle pour lui être agréable. Mais l’œuvre du Sauveur ne consistait pas à satisfaire la curiosité des humains ni à rechercher sa propre sécurité. Son pouvoir divin, miraculeux, devait s’exercer non pour lui-même, mais pour le salut de ses semblables.

Jésus ne répondit pas un seul mot à la série de questions qu’Hérode lui posa ; il ne répondit pas non plus à ses ennemis qui l’accusaient avec violence. Hérode fut profondément vexé de voir qu’il ne semblait pas craindre son autorité. Sur ce, lui-même et ses soldats se moquèrent du Fils de Dieu et le maltraitèrent. Mais il fut surpris de l’attitude noble, divine de Jésus lorsqu’il était soumis à de tels mauvais traitements. Aussi, craignant de le condamner, il le renvoya à Pilate.

Satan et ses anges assaillaient Pilate de leurs tentations dans le but de le conduire à sa perte. Ils essayaient de le persuader que s’il ne prenait pas la responsabilité de faire condamner le Christ, d’autres la prendraient à sa place. En effet, la foule voulait à tout prix la mort de Jésus. S’il ne lui livrait pas l’accusé pour qu’il soit crucifié, Pilate perdrait son pouvoir et son prestige   aux yeux des hommes, et on le dénoncerait, lui, comme ayant pris fait et cause pour un imposteur. Par crainte de perdre son pouvoir et son autorité, ce gouverneur romain consentit à la mort du Fils de Dieu. Et bien qu’il ait rejeté la responsabilité   de cette condamnation sur les accusateurs du Christ, et que la foule acquiesça en disant : “Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants !” (Matthieu 27 :25, Segond), Pilate ne fut pas lavé pour autant de sa faute. Il fut coupable du sang de Jésus. Par pur égoïsme, par amour des honneurs des grands de la terre, il a livré à la mort un innocent. Si ce procurateur avait agi selon ses convictions intimes, il aurait refusé de participer en quoi que ce soit à la condamnation du Sauveur.

L’attitude de Jésus et les paroles qu’il a prononcées au cours de son procès firent une impression profonde sur les esprits d’un grand nombre de personnes présentes à cette occasion. Les fruits de l’influence ainsi exercée par le Seigneur se manifestèrent après sa résurrection. Parmi ceux qui furent alors ajoutés à l’Eglise, nombreux étaient ceux dont la foi en lui avait été éveillée le jour de son procès.

Satan entra dans une grande colère lorsqu’il vit que toutes les cruautés infligées à Jésus et qu’il avait inspirées aux Juifs, ne lui avaient pas arraché le moindre murmure. Bien que le Christ eût revêtu la nature humaine, le Sauveur était soutenu par une force divine, et il ne s’écarta nullement de la volonté de son Père—pas même d’un iota.

Source: L’Histoire de la Redemption de Ellen G. White

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