Le chrétien et la politique : péril ou opportunité ?

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Le chrétien et la politique : péril ou opportunité ?

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Staff AdventDesk Réponses sélectionnée comme la meilleure 24 mai 2019
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John Wesley Taylor V

Un argument en faveur de vivre sa vie comme le Christ, par le Christ, sous tous les angles.

Quel rapport un chrétien doit-il entretenir avec la politique ? Faut-il que le croyant s’implique dans des causes sociales, s’engage dans le militantisme politique, ou pratique la désobéissance civile ? Doit-il voter, prendre sa carte d’un parti politique, ou faire campagne pour un candidat ou un parti ? Doit-il se présenter à des élections, obtenir un poste de haut fonctionnaire ou chercher à légiférer en matière de moralité ?

Nous allons d’abord tenter de proposer un cadre de référence pour toute position chrétienne concernant la politique. Puis nous verrons comment le point de vue biblique peut éclairer un certain nombre de questions sociopolitiques.

Le cadre biblique
Débutons avec la question la plus fondamentale : quel genre de rapport un chrétien doit-il entretenir avec la politique ? Un certain nombre de positions ont été proposées à ce sujet, à savoir : (1) le rejet, (2) le paradoxe, (3) la collaboration critique, (4) la synthèse et (5) l’imposition1. Si chacune de ces positions (synthétisées au Tableau 1) peut constituer une réponse appropriée à une situation spécifique, il semble utile de définir un cadre de référence unificateur pour la position chrétienne.

Il faut d’abord et avant tout reconnaître que Jésus-Christ règne sur tout (cf. Ac 10.36 ; 1 Co 1.2) et qu’en toutes ses dimensions, la société humaine doit être consciente de sa souveraineté (voir Tableau 3). Cette reconnaissance de la suprématie du Christ s’étend au domaine politique (cf. Col 3.17 ; 1 Co 10.31). Il faut en déduire, non pas la double citoyenneté du croyant, mais qu’il est citoyen du royaume global de Dieu (cf. Ps 47.8).

En même temps, le chrétien sait que l’humanité est entraînée dans un conflit cosmique entre le bien et le mal, entre Jésus et Satan (cf. Gn 3 ; Ap 12.17). Le bien et le mal apparaissent donc dans chaque facette de la société, y compris la politique. Il est vital de prendre en compte, pour formuler une position chrétienne, les principes de la Bible. Partout dans l’Écriture se trouvent énoncés des principes d’orientation quant aux rapports entre chrétiens et politique (voir Tableau 3). Il y a aussi les cas individuels — Joseph, Moïse, Débora, David, Élisée, Daniel, Néhémie, Mardochée, Jean-Baptiste, Pierre, Paul et Jésus lui-même — autant d’exemples vivants de l’application de ces principes. Nous partirons de ces derniers pour nous tourner ensuite vers des questions sociopolitiques précises.
L’implication dans des causes sociales
Nous ne pouvons, en tant que chrétiens, nous détourner des besoins sociaux. Dans les traces de Jésus, nous devons porter assistance aux indigents, rendre la liberté aux opprimés, protéger les plus vulnérables et donner une voix aux marginalisés (cf. Mt 25.36 ; Lc 4.18). Gestionnaires de la planète (cf. Gn 2.15 ; Ap 11.18) nous devons œuvrer à la protection de la création du Seigneur et à l’amélioration de la vie d’autrui. Il nous faut aimer notre prochain comme nous-mêmes (Mt 22.39).

En tant qu’adventistes, nous devons aussi user de notre influence pour amener la société à une prise de conscience et pour devenir des catalyseurs. Nous devons nous efforcer d’agir en redresseurs de torts afin que les défavorisés puissent avoir l’opportunité de recouvrer leur autonomie et leur estime de soi 2.

De plus, nous devons prêter attention à la société au sens le plus large. Nous ne devons pas nous contenter de « faire tourner des “ambulances” pour emmener les victimes ensanglantées de structures sociales destructrices »3, mais nous efforcer plutôt de changer ces structures, bâtissant des alternatives positives au mal existant. C’est en nous engageant ainsi auprès d’un monde souffrant que nous insufflerons le message du Christ dans la culture populaire.
L’engagement dans le militantisme politique
Nous devons donc nous méfier de la passivité. Nous avons été appelés pour faire la différence (cf. Mt 5.13-15). D’ailleurs, un croyant qui ne se dresse pas contre le mal partage dans une certaine mesure la culpabilité de ceux qui le commettent (cf. Ez 3.17-19). Dieu n’attend pas de ses fidèles qu’ils se retirent de la société et laissent les commandes sociopolitiques entre les mains des mécréants (cf. Pr 29:2). « Ne rien faire » constitue en soi un acte politique, une sorte d’abdication ouvrant la voie à ceux qui ne partagent pas les valeurs chrétiennes.

Il paraît clair que la responsabilité du chrétien ne peut être évitée quand la morale est en cause — légalisation du mariage homosexuel, tabagisme dans les lieux publics, jeux de hasard, par ex. En d’autres domaines, le croyant doit décider, l’Esprit saint le guidant, si tel ou tel genre de militantisme constitue une forme acceptable de service chrétien ou outrepasse le mandat de l’Évangile.

Il importe aussi de se pencher sur la forme du militantisme. Si les chrétiens doivent éviter tout type d’action politique violente ou contraire à l’éthique, il peut y avoir des méthodes militantes correspondant aux valeurs et croyances chrétiennes (cf. par ex. Mt 26.52) et permettant « [d’]accomplir la justice et aimer la bonté » (Mi 6.8 Bible de Jérusalem). Cela peut vouloir dire exiger des responsables politiques qu’ils tiennent leurs promesses et assument le rôle que Dieu leur a donné — instaurer la justice et maintenir l’ordre civil (cf. Rm 13). Cela peut vouloir dire critiquer le gouvernement et proposer des stratégies d’amélioration du bien-être de la société (cf. Gn 41 ; 2 S 12.1-15 ; 1 R 13.1-9 ; Mt 14.1-4 ; Ac 24.25), mais aussi prendre position contre les politiques gouvernementales favorisant l’oppression ou l’exploitation. Ou se prononcer publiquement contre un nationalisme militant qui rejetterait la fraternité humaine (cf. Ac 17.26). Ou encore s’impliquer dans des actions ayant encore plus de portée : défense d’autrui, médiation et conciliation4.
De la désobéissance civile
Étant donné l’indication de se soumettre au gouvernement ainsi que l’engagement suprême du croyant envers Dieu (cf. Ac 4.19 ; 5.29 ; 1 P 2.13-15 ; Rm 13.1-7), que doit faire le chrétien quand ce que l’État exige va à l’encontre de la volonté divine ? Cette tension entre deux pôles d’obéissance se résout dans la désobéissance civile chrétienne — action (ou refus d’agir) non violente, décidée en toute conscience, que les autorités traiteront comme un viol de la loi.

Les précédents ne manquent pas : Flavius Josèphe5 relate l’histoire d’un mouvement juif de lutte contre l’introduction dans Jérusalem, par Pilate, d’images de l’empereur. Pour protester, de nombreux juifs sont restés étendus dans la cour du palais pendant cinq jours. Menacés de mort, ils dénudèrent leur nuque, disant préférer le massacre à cette profanation. Pilate céda, et les images furent retirées.

Marcellus, centurion romain martyrisé en 298 ap. J.-C., refusa d’adorer l’empereur comme l’exigeait le règlement militaire. Il déclara : « Je quitte le service militaire de vos empereurs et je méprise toute adoration de vos dieux de pierre et de bois. […] Si la situation de ceux qui sont engagés dans l’armée est qu’ils sont obligés de faire des sacrifice aux dieux et aux empereurs, alors je jette mon bâton de centurion et mon ceinturon, je renonce aux étendards et refuse de servir comme soldat. »6

Au XVIe siècle, les anabaptistes violaient la loi en ne baptisant pas leurs nouveau-nés et en rebaptisant les adultes. Ils firent donc l’objet de persécutions concertées aboutissant à leur quasi annihilation7. Plus récemment, dans une Amérique du Nord marquée des suites de l’esclavage, Martin Luther King fit appel à la désobéissance civile dans sa lutte contre la discrimination. En Afrique du Sud, Nelson Mandela et l’évêque Tutu tinrent ferme contre l’apartheid, ce qui leur coûta très cher8.

L’enjeu étant considérable, le chrétien doit pouvoir évaluer la situation : exige-t-elle vraiment de passer à la désobéissance civile ? Il peut baser sa réflexion sur ces critères : (1) l’immoralité de la loi combattue, son conflit avec une norme plus haute. Les chrétiens avaient raison, à ce titre, de dissimuler des Juifs aux nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. (2) L’épuisement de tous les recours autres que la désobéissance. Avant de se lancer dans la désobéissance civile, le croyant doit chercher réparation — en demandant l’adoption d’une législation plus juste ou en en appelant aux tribunaux pour faire abroger une loi contraire aux droits de l’homme. Pareilles méthodes ont été utilisées avec succès par les Mennonites à propos du service militaire et des impôts de guerre. (3) Acceptation manifeste du prix à payer. Les croyants s’engageant dans la désobéissance civile doivent être prêts à subir la répression gouvernementale et à accepter les conséquences de leur sainte obéissance — au risque de perdre leurs biens, leur liberté, voire la vie. Une fois évalué ainsi9, il y a de fortes chances pour que tout acte de désobéissance civile soit aussi manifestation d’obéissance à Dieu.
Le compromis politique
Il arrive que les chrétiens refusent de s’engager en politique parce que cela implique conflit et compromis. Il faut reconnaître que la coopération et la recherche d’un terrain d’entente sont, en fait, des formes de compromis, essentielles au fonctionnement de toute société.

Le cas de Pilate et de son injuste condamnation à mort du Christ constitue pourtant un avertissement sur les dangers du compromis. Alors, un enga- gement politique particulier exige-t-il inévitablement la compromission avec le mal ? Une foi entré en politique, un chrétien peut-il préserver son intégrité morale ? Le facteur décisif est de savoir si le compromis implique l’abandon de principes bibliques moraux10. Si tel n’est pas le cas, le croyant peut coopérer avec d’autres pour obtenir une solution « gagnant-gagnant ». Mais si cela implique de sacrifier des principes, s’il n’y a pas d’alternative acceptable, il faut être prêt à démissionner de toute charge politique.
Le vote
Est-il approprié, pour un chrétien, de voter sur une question particulière ou pour une personne précise ? Est-il correct d’inciter d’autres personnes à voter de telle ou telle manière ? La Bible ne mentionne pas directement le vote parce que la démocratie n’existait pas à l’époque. Le cas de figure le plus proche est peut-être celui de la sélection des diacres au sein de l’Église chrétienne primitive (Ac 6.1-7). Il fut conseillé aux croyants de « [choisir] parmi vous sept hommes de qui l’on rende un bon témoignage, remplis d’esprit et de sagesse » (NBS). L’intégrité morale ainsi qu’une claire compréhension des affaires d’actualité semblent donc être des critères clés du choix de candidats en vue d’un poste de responsabilité.

Pour certains chrétiens, si Dieu a dit de prier pour les responsables civils (1 Tm 2.1, 2), il n’a pas dit de voter. Selon eux, voter pour un candidat revient à mettre sa confiance dans l’homme11. Or si les chrétiens doivent bien prier pour les leaders gouvernementaux, cela n’interdit pas d’agir comme électeur. Jésus nous a aussi dit de prier pour notre pain quotidien. Devrions-nous alors attendre que Dieu nous nourrisse ou ne devons-nous pas trouver du travail et laisser le Seigneur nous utiliser comme réponse à la prière ?

Par essence, le refus de choisir est une forme de décision. En ne votant pas, nous prenons quand même position — une position qui ne sera pas forcément celle que nous aurions aimé prendre. Certaines décisions gouvernementales ont un impact sur la famille : normes de décence pour les médias, règles sur l’abus des drogues ou définition des programmes scolaires, par ex. D’après l’Écriture, les croyants ont la responsabilité de prendre soin et de protéger leur famille (Pr 22.6 ; Ep 5.28, 29 ; 1 Tm 5.8). Si un vote peut contribuer à sauvegarder la famille et à créer un environnement plus sain pour nos enfants, comment refuser de voter, laissant le champ libre aux partisans d’intérêts immoraux12 ?

En tant que chrétiens et citoyens, nous avons le devoir de nous instruire sur les questions et programmes politiques, tout en reconnaissant que chaque personne garde son libre arbitre et qu’un politicien peut prendre, une fois élu, des mesures contraires à ses convictions et positions proclamées avant l’élection. Nous ne pouvons alors être tenus responsables de tels actes, mais nous devons exiger qu’il en rende compte au regard des engagements qu’il a pris.

Et enfin, en tant que chrétiens, nous reconnaissons et respectons la liberté individuelle de conscience et de croyance. En conséquence, nous devons ne jamais tenter de forcer les gens à voter dans un sens ou dans l’autre13. Il faut aussi éviter d’œuvrer à la création d’un bloc chrétien puissant et ne pas tenter d’imposer notre agenda moral. Il faut plutôt chercher la paix et la justice.
Alignement partisan
L’Église adventiste ne doit jamais s’aligner sur un parti (ou système) politique particulier. « Une telle identification, remarque Beach, pourra apporter un bref alpha de privilèges temporaires, mais inévitablement elle entraînera l’Église le long de la pente glissante de la politique, vers un oméga où prophétie et évangélisation se retrouveront paralysées. »14Elle érodera la séparation entre Église et État et pourra déboucher sur l’intolérance religieuse et la corruption des convictions.

Ellen White dit de se méfier de l’engagement politique (qu’il s’agisse de se présenter aux élections ou de militer pour un parti) de pasteurs et enseignants employés par l’Église15, car pareille affiliation politique risque, dans le cas d’un pasteur, de jouer un rôle diviseur dans l’Église et d’amoindrir sa capacité d’exercer son ministère auprès de l’ensemble de l’assemblée.

Quid des affiliations partisanes à titre personnel ? Y a-t-il une différence entre action politique et inscription à un parti politique ? Si se préoccuper d’une question particulière peut nous amener à soutenir tel ou tel candidat d’un parti, nous devons éviter de confondre action politique morale et politique partisane. Un chrétien doit éviter de voter constamment en faveur du même parti ou de soutenir un candidat pour sa seule affiliation partisane. L’adoption de certaines positions morales peut, en fait, transcender les limites partisanes, en fonction du contenu de la plateforme électorale et des candidats impliqués. Mais par essence, tout engagement partisan ne peut se faire qu’avec précaution et être conditionnel16.
Accéder à des postes de responsabilité politique
Est-il correct, pour un chrétien, d’assumer une fonction officielle publique, qu’il y soit nommé ou élu ? Des chrétiens peuvent-ils se présenter à des élections sans diviser leur Église ? Un politicien chrétien peut-il vraiment accomplir grand-chose en politique ? Les politiciens chrétiens ont-ils le moindre droit de permettre à leur conscience de dépasser les vues majoritaires de leurs mandants ? Questions difficiles, certes. Pourtant, en tant que croyants, nous devons y chercher avec soin une réponse chrétienne.

Les cas de Joseph, de Daniel et de Néhémie indiquent qu’un croyant peut occuper avec efficacité un poste au sein de l’appareil gouvernemental séculier sans sacrifier ses principes moraux. Dans la même optique, Ellen White dit qu’il n’y a rien de mal à aspirer « à siéger dans des conseils délibératifs et législatifs et de contribuer à l’adoption de lois destinées au pays », tant que l’on ne compromet pas ses principes religieux17. Chacun doit cependant examiner avec honnêteté les motifs de sa quête d’une fonction politique : désir de s’attaquer à l’injustice ou d’améliorer le bien-être d’autrui, ou désir de célébrité, de pouvoir, d’avantages économiques ?

L’aspect le plus complexe de tout cela est peut-être l’identification à un parti politique particulier, étant donné que la grande majorité des positions éligibles et nombre de nominations civiles dépendent d’une affiliation partisane. Certes on peut choisir de se présenter en indépendant, mais la chance de parvenir à une fonction gouvernementale sans reconnaissance partisane est bien marginale.

Si un croyant décide de s’inscrire à un parti politique, ses liens avec ce parti doivent avoir leurs limites. Un politicien adventiste ne peut vraiment pas prendre d’engagement irrévocable envers quoi que ce soit qui ne soit pas authentiquement chrétien. De plus, il doit être sensible à la mission de l’Église et s’abstenir de paroles ou d’actes partisans risquant de saper sa mission ou de fracturer sa communauté.
Légiférer en matière de moralité
Les chrétiens doivent-ils s’efforcer de légiférer en matière de moralité ? Y a-t- il un agenda politique spécifiquement chrétien, que les croyants devraient chercher à mettre en œuvre ? Dieu appelle-t-il les chrétiens à gouverner ?

Tout en nous souciant de promouvoir ce qui est juste, il est clair que l’on ne peut rendre les gens bons par décret. Civile ou biblique, la loi ne peut que viser à exercer une mesure de contrôle sur le comportement. Le gouvernement, par essence, ne peut rendre l’humanité parfaite, il ne peut que la protéger. Mais si l’on ne légiférait pas en matière de moralité, il n’y aurait alors aucune loi contre le vol, le viol ou le meurtre18. La question n’est donc point tant de savoir si nous devons légiférer ou pas, mais plutôt quel genre de moralité nous devrions chercher à faire inscrire dans la législation et par quels moyens.

Pour contribuer à ce que la loi reflète une norme morale biblique, un adventiste peut passer par la pétition, l’interpellation des élus, le vote pour les personnes promettant de soutenir des positions morales ; il peut protester contre les mauvaises décisions et s’impliquer directement, comme politicien. Il nous faut reconnaître qu’essayer de légiférer contre tous les péchés aboutirait à un État totalitaire.

Dans un essai très perspicace19, Richard Neuhaus décrit « l’agora nue », où les valeurs religieuses ont été éliminées des forums publics, et « l’agora sacrée », où l’on vise avec arrogance à imposer par la force les valeurs religieuses. Ces deux cas de figure, dit-il, sont mauvais. Les chrétiens doivent promouvoir une « agora civile », lieu de débat ouvert et vigoureux sur des questions controversées.
Réflexion en guise de conclusion
En somme, bien que la politique ne soit pas en elle-même bonne ou mauvaise, elle comporte pour nous chrétiens autant de périls que d’opportunités : on y risque de compromettre ses principes et de voir ses valeurs se corroder, ainsi que de se laisser engloutir totalement dans la participation à la vie politique. Mais en même temps, on y trouve des opportunités significatives d’être « le sel de la terre » et « la lumière du monde », en servant comme témoin efficace du Seigneur. Cette perspective peut nous amener à une réorientation radicale de notre réflexion — passant d’une conception de l’engagement chrétien vu en termes d’action sociopolitique à une vision de la participation politique comme une réponse de foi par le témoignage20.

De plus, en tant qu’adventistes, nous devons aborder la politique à la lumière des événements de la fin, quand les institutions tenteront de légiférer les consciences et de renverser la vérité (cf. Apocalypse 13.16, 17). Nous devons nous préparer à prendre position publiquement en faveur de la liberté religieuse et des droits de l’homme, contre la discrimination et la décadence et à rester fidèles à notre devoir d’adorer le créateur du ciel et de la terre, avec le sabbat comme signe d’allégeance (Apocalypse 14.6-12). Nous devons prôner la Parole de Dieu comme autorité suprême de notre vie, formatrice de toutes nos interactions, y compris notre rapport à la politique.

S’il se peut que pour l’Église, pour ses leaders et pour ses membres individuels, le niveau et la forme de participation politique varient, la mission de l’Évangile doit toujours inclure tant la proclamation que la révélation tangible de l’identité de Dieu. Cette mission implique de prendre position vocalement et par le bulletin de vote contre l’immoralité et pour tout ce qui est justice et compassion et de se soucier de la divine création dans toute sa diversité — y compris « l’un de ces plus petits » (Mt 25.40, NBS). C’est l’engagement à vivre sa vie comme le Christ, par le Christ et pour le Christ, sous tous les angles.

John Wesley Taylor v, docteur ès Lettres, est directeur adjoint du Département de l’éducation de la Conférence générale. Son courriel : taylorjw@gc.adventist.org.

RÉFÉRENCES

  1. Je suis redevable, pour l’établissement de ces catégories, à H. R. Niebuhr, Christ and Culture (New York : Harper and Row, 1951), et à N. E. Thomas, « Church-State Relations and Mission, » in James M. Phillips et Robert T. Cootes, éds., Toward the 21st Century in Christian Mission (Grand Rapids, Michigan: William B. Eerdmans, 1993), p. 363.
  2. Pour B. Beach, par exemple, « le christianisme n’est pas une religion qui prône une introversion ou un individualisme isolés : c’est une religion communautaire. Les vertus et les dons chrétiens ont des applications sociales. Un engagement pour Jésus-Christ veut dire un engagement envers tous les enfants de Dieu et cet engagement entraîne une responsabilité envers les autres et leur bien-être » (in « Le Chrétien et la politique » Dialogue (1997), 9.1 p. 5). Ce concept se trouve approfondi in C. Henderson, « Will a Real Biblical Politics Please Stand Up? », 2007, sur http://www.godweb.org/ biblicalpolitics.htm.
  3. R. J. Sider, Rich Christians in an Age of Hunger (Downers Grove, Illinois : Inter-Varsity Press), p. 192.
  4. L’Église adventiste a publié ses prises de position sur le changement climatique, le clonage humain, le racisme, la contraception et les unions homosexuelles, ainsi que d’autres consacrées à des événements politiques précis, comme la crise du Kosovo ou les attentats du métro londonien.Voir en anglais sur http://www.adventist.org/beliefs/statements/ index.html et en français pour certains sur http:// www.adventiste.org/engagements.php?id=1.
  5. Flavius Josèphe (trad. Arnauld d’Andilly), « Histoire ancienne des Juifs » in Histoire ancienne des Juifs, La Guerre des Juifs contre les Romains, Autobiographie (Paris : Éditions LIDIS, 1968- 1973), p. 561.
  6. C. J. Cadoux, The Early Christian Attitude to War (New York : The Seabury Press, 1982), p. 152.
  7. D. Heffelbower, « The Christian and Civil Disobedience », Direction, (1986), 15:1, p. 23-30.
  8. La philosophie de la désobéissance civile face au mal (au plan moral) a été élaborée à l’époque moderne par des personnalités telles que Henry Thoreau (La Désobéissance civile) et Léon Tolstoï (voir ses écrits sur la désobéissance civile et la non-violence (Writings on Civil Disobedience and Nonviolence, non disponible en français) et Le Royaume des cieux est en vous).
  9. Élaboré plus complètement in S. C. Mott, Biblical Ethics and Social Change (New York : Oxford University Press, 1982). Nous devons toujours « chercher d’abord le règne de Dieu et sa justice » (Matthieu 6.33, NBS).
  10. Par ex. : C. Knott, « The Christian and Politics », 2001, sur http://www.nlbchapel.org/politics.htm et R. L. Saucy, « The presence of the Kingdom and the Life of the Church », Bibliotheca Sacra (janvier-mars 1988), 145, p. 46.
  11. En 1881, alors qu’on débattait aux États-Unis d’un amendement constitutionnel prohibant la vente de boissons alcoolisées, Ellen White observa : « Bien des gens déplorent cet état de choses, mais se considèrent comme dégagés de toutes responsabilités en la matière. Ils ont tort…. tous les citoyens peuvent par leur vote avoir une action sur les lois qui régissent la nation. Cette influence et le vote ne devraient-ils pas faire pencher la balance du côté de la tempérance et de la vertu ? » Ministère évangélique (Dammarie-Lès-Lys : Éditions Vie et Santé, 2000), p. 378.
  12. « Gardez votre vote pour vous-même. Ne vous croyez pas obligés d’imposer à d’autres votre manière de voir. » Messages choisis, Vol. II (Mountain View, Californie : Éditions Le Monde français, Publications interaméricaines, Pacific Press Publishing Association, 1971), p. 378.
  13. Beach, Dialogue (1997) op. cit., p. 6.
  14. Par ex. : « Ceux qui enseignent la Bible dans nos églises et dans nos écoles ne sont pas libres de manifester leur opinion pour ou contre des hommes ou un parti politique. En le faisant, ils excitent les esprits de sorte que chacun préconise sa théorie favorite… et la division [naîtra] dans l’Église. » E. G. White, Ministère évangélique, op. cit., p. 382. « Ceux qui enseignent dans l’Église ou dans nos écoles et qui se distinguent par leur zèle politique, devraient être relevés de leurs responsabilités sans délai, car le Seigneur ne peut coopérer avec eux. La dîme ne doit pas être employée pour permettre à quelqu’un de faire une propagande politique. Chaque professeur, chaque prédicateur, ainsi que chacun de ceux qui sont chargés de la direction de l’œuvre de Dieu, s’ils sont animés du désir de propager leurs opinions politiques, devraient être convertis à la seule vérité de l’Évangile ou abandonner leur travail. » (ibid, p. 384).
  15. Concept débattu de manière plus approfondie in J. H. Redekop, « The Christian in Politics : Some Basic Problems », Direction, (1985), 14:1, p. 34-41.
  16. E. White, Fundamentals of Christian Education (Nashville, Tennessee : Southern Publishing, 1923), p. 82.
  17. On trouvera une discussion perspicace à ce sujet in E. Craswell, « The Biblical Basis for Christians in Politics and Government », 2007, sur http://www. whateveristrue.com/heritage/ticipate.htm.
  18. R. J. Neuhaus, The Naked Public Square : Religion and Democracy in America (Grand Rapids, Michigan : W. Eerdmans), 1986.
  19. Concept élaboré plus avant dans un article de R. Mathies, « Witness and Struggle or Politics and Power : MCC Engages the World », Direction, 1994), 23:2, p. 77-87.

Source: Revue Adventiste « Dialogue Universitaire »

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